Inarritu = Zola puissance 10 !


(1) commentaires

"Biutiful" ? vous avez dit "Biutiful" ?

En spectateur curieux, qui aime la vie et le cinéma, vous avez forcément envie d'aller voir ce film espagnol (Inarritu est cependant mexiciain) dont le bel acteur, Xavier Bardem, a été primé à Cannes; mais rappelez-vous cet adage, trop souvent constaté, primé à Cannes signifie déprimé chez vous, à Nice ou ailleurs !

Les amateurs d'atmosphère à la Zola, de toute forme de vérisme au cinéma et de films chocs ne seront certainement pas déçus, car il n'y a pas un centimètre carré de "ciel bleu", au sens figuré, dans ce "long" métrage... Et c'est bien vrai qu'il paraît long ce film : vies misérables, quartiers pourris de Barcelone, tout est lépreux, sale, malsain.

Les hommes, les femmes et les enfants sont des zombies laissés pour compte dans un monde implacablement inhumain fait de magouilles, voire d'esclavage, de coups bas, de drogue, de malhonnêteté...

Le protagoniste, joué par Xavier Bardem, a aussi un don semble-t-il, il peut parler avec les morts, qui curieusement quittent ce monde en ressemblant à spiderman car ils restent collés au plafond ! Mais voilà on peut avoir un don de double vue et rester aveugle sur soi. La guérisseuse qui semble être aussi sa confidente, lui confiera des pierres qu'il devra remettre à ses deux enfants pour les protéger avant sa mort; un petit poucet à l'envers en quelque sorte, quoique je ne veux rien dire qui serait mal interprêté à ce niveau car je suis moi-même branché lithothérapie !


Un cancer donc va vite l'emporter et le film agonise avec lui sans nous épargner les pisses saignantes et tout le sordide de chaque situation. Une ex femme déjantée, nymphomane, violente, provocante, vulgaire, presque cro-magnonne quand elle mange des glaces périmées avec ses doigts donnant l'exemple à sa famille, sans doute prostituée à l'occasion et toute boursouflée dans son court-bouillon de turpitudes lui empoisonne ses derniers moments; les enfants trinquent comme d'habitude, on est étonné d'ailleurs de ne pas les voir souffrir d'une grave maladie eux aussi, mais le petit garçon passablement perturbé est frappé par sa "mère"; les chinois sont utilisés comme du bétail, car ce monsieur, (Xavier Bardem), est une sorte d'homme orchestre des milieux mafieux et du travail au noir; les sénégalais sont coursés par des flics véreux et réexpédiés chez eux alors que leurs familles restent misérablement cachées dans des taudis, et image terrible la mer rejetera les corps des chinois dont on a voulu se débarasser!
Comme quoi il se passe à Barcelone ce qui se passe dans beaucoup trop de villes d'Europe... Ceci dit, ce mille feuille de drames, d'horreurs, de tristesse, de ladreries, de mixions, de souillures diverses, de cadavres exhumés dans un cimetière qui ressemble à une casse de ferrailleur, de misères, de crasse m'a passablement écoeuré et révolté, on étouffe dans ce film!


Le réalisateur Inarritu
Que reste-t-il de tout ce fatras et que veut nous dire le réalisateur? Qu'il y a une vie après la mort et que nous devons essayer d'arranger les choses ici-bas pour "partir" le coeur léger? Le personnage central essaye bien de modifier sa conduite mais cela reste marginal; par exemple les chauffages à gaz achetés à un prix dérisoire pour permettre au travailleurs chinois, nouveaux esclaves, d'avoir moins froid sont hors norme, on devine la suite... C'est quasiment impossible, semble nous dire le réalisateur, de sortir de son "destin" et de sa "force" pour reprendre une image verdienne. D'ailleurs l'argent sale peut-il autoriser une autre "direction" que les intentions initiales qui l'ont produit?


Il y a aussi deux chinois homosexuels et affairistes, dont un bi à l'évidence, mais tout sera réglé par un meutre sanguinolent; et le chinois "bi" peut repartir dans son chemin malfaisant pour retrouver sa famille, délaissant son conseiller gay dans son lit de mort!

A la première scène j'ai cru aussi que Xavier Bardem draguait un mec dans un bois enneigé (sans doute est-ce une déformation personnelle...), mais la première scène trouve son explication dans le cadavre exhumé qui n'est autre que celui de son père, le même personnage qui apparaît au début mais dans ce passage un peu décomposé certes!

Dans la dernière scène du film, le père et le fils, curieusement aux âges inversés, quittent ce monde froid, ce monde de neige et de mort et s'en vont ensemble voir au-delà ce qui se passe. La neige et la mort, déjà dans Chrétien de Troyes, sont souvent associées. C'est la seule touche poétique de ce film qui se déroule dans un océan de malheurs et d'excréments!

Si vous trouvez que la vie est belle, modulez vos ardeurs et courez voir ce film!
W Cliff
Willian Cliff, poète belge, avait donné une vision très particulière de Barcelone, en accord avec le poète catalan Ferrater son inspirateur, le sonnet ci-dessous, tiré du livre "Autobiographie" en 1993, ne laisse planer aucun doute sur cette parenté de situation avec le présent film, vous apprécierez ces images en rafale comme autant de photographies crues de cette ville :

"fureur de boire et fureur de baiser

fureur d'avoir un peu d'argent pour boire

prostitution canaille vaine gloire

vêtements noirs corps maigres épuisés

murs de maisons ornés de merde humaine

vieux restaurants à repas bon marché

vins noirs pompés à même la bouteille

tabacs collés aux lèvres désséchées

putains atroces rangées dans les bars

sous le néon blème et impitoyable

enfants vendant des denrées périssables

pour appeler l'attention des bagnards

hurlant comme des canards qu'on écrase

enfant dormant à même le trottoir"

Cité dans ce billet :

1 commentaire:

  1. Très très déstabilisant, ceci dit..
    La scène des cadavres asphyxiés m'a littéralement anéeantie..
    difficile d'en garder un bon souvenir, pourtant il me semble que le film est réussi.. quoiqu'un peu long à mon goût..

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