« LES CONDAMNES » au « royaume d’aveugles que sont la plupart des pays homophobes »*


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dE Philippe CASTETBON aux Éditions H&O; * emprunté à un témoignage du livre,





« J’en suis venu à réaliser que la plus grande forme d’amour est l’acceptation. » « condamné » des Bahamas





Contrepartie obscure de notre occident où les personnes LGBT ne cessent de se livrer à travers des milliers de sites web à une exhibition sans pudeur ni retenue, trop souvent de mauvais goût à mon sens, le livre « Les condamnés » de Philippe CASTETBON, journaliste et photographe, révèle un univers inverse fait de craintes, de peurs et d’angoisse, hanté par des hommes dont l’identité est cachée à double titre : par nom et par essence.

Tout d’abord on est frappé par la qualité de certaines de ces photos et l’imagination des garçons de ces pays qui ont répondu à la requête de Philippe CASTETBON via Internet. En effet, ces « portraits » sont de grande qualité artistique, autant au niveau de la photo que des textes eux-mêmes, et laisse percevoir une énorme sensibilité. Ces photos en effet semblent réalisées par de vrais photographes de par une certaine forme de mise en scène via l’utilisation des vêtements ou des voiles pour se cacher le visage, ou l’utilisation d’objet particulier porté comme un masque, ou simplement par leur propres mains ! Ces « condamnés » n’ont ni visage ni regard mais ils ont bien une âme !



Dans ces pays, être gay c’est se cacher en permanence et vivre dans la peur, c’est l’anonymat forcé, l’identité zéro, la sexualité refoulée et interdite, et le reniement de soi qui conduisent ces hommes dans une terrible et mortelle impasse ! Il n’y a toutefois pas de « témoignages » féminins puisque l’approche de ces hommes dans ces pays de fer n’a été possible pour Philippe Castetbon que via Internet sur des sites de rencontres masculins.

Ce livre, qui témoigne sur ces hommes bafoués dans leur droit d’être ce qu’ils sont, dénonce les viles condamnations dont ces homosexuels font les frais dans de trop nombreux pays ! Plus de 80 ! Le livre est ainsi conçu comme un terrible dictionnaire...

Dans ces parties du monde, en peau de chagrin pour l’espace de liberté, la terre continue à être plate comme au temps de l’Inquisition ! Telle une pièce de monnaie, il y a un côté face inaccessible où la loi est favorable à tous, la liberté partagée et où la vie peut s’épanouir (le rêve de l’occident), et un côté pile où la traque et la menace permanente sont le quotidien de ces « parias sexuels », car la sexualité dans ce cauchemar ne peut être définie que par la loi (divine). L’individu n’est plus maître de lui-même, l’impasse est totale : d’un côté la prison ou l’échafaud si l’on va au bout de sa vérité, de l’autre une vie sans cesse épiée, cachée, opprimée.

Ce livre est un témoignage émouvant car il n’est pas un énième rappel extérieur de ce qui est vécu par ces homosexuels, c’est, grâce à l’image qu’ils donnent à voir d’eux-mêmes et par leurs propres mots, un témoignage bouleversant et unique, à lire absolument.


Hommes cachés, hommes voilés, hommes dérobés à la vue des autres, ils ont perdu leur visage, pris dans un huis clos où ils sont prisonniers à tout jamais. En cela le sort des gays (et lesbiennes) rejoint celui des femmes en général qui n’ont pas non plus dans ces pays de véritables libertés. Peut-être nous feront-ils prendre aussi conscience que ces visages entravés sont aussi les nôtres et qu’il n’y a pas de vraie liberté tant que celle-ci n’est pas offerte à tous.



Philippe CASTETBON a eu la bonne idée de donner à chaque fois des extraits des lois de ces pays en parallèle aux portraits proposés, la réunion des deux est plus qu’insoutenable !

Que veulent donc ces sociétés inquisitoriales : gommer les différences ? Ne donner qu’une voie de conduite et de vie ? Réaliser des clones ? Étouffer toute dissidence sexuelle et sentimentale ? C’est un procès sans cesse alimenté par des interdits religieux, ou dont les racines sont religieuses, et qui ne s’explique que par le concept de « contre nature » que l’on retrouve clairement exprimé dans une majorité de lois de ces pays.

C’est donc cela leur référence : ce qui est permis et souhaité par « la nature » et ce qui ne l’est pas, ce qui est bien et mal, ce qui est possible et impossible ! Loin de concevoir que « la nature » justement permet tous les cas de figure et toutes les combinaisons possibles, ces sociétés ont une conception figée et archaïque et une lecture ultra-restrictive du monde. Loin de permettre l’émergence de la différence et de l’altérité, elles ne veulent produire que le même schéma du bon « citoyen » convenable à l’infini !

Internet a permis à ces « condamnés » de s’échapper et de parler librement, tels des prisonniers qui échangent des messages hors contrôle de leur garde chiourme à travers les barreaux de leur fenêtre ! Ici ils ont fait de même à travers leur écran et ils nous donnent ces brides d’eux-mêmes : cris désespérés de liberté, lambeaux de portrait où leur regard absent nous hante malgré tout.

Encore une fois les éditions H&O ont produit un livre original et fort, bouleversant et unique et nous donnent à découvrir, grâce à Philippe CASTETBON, nos frères si esseulés et meurtris et ce juste à côté de notre « paradis » occidental…
















Notes :


bibliographie de Philippe CASTETBON :

« Nu » avec les photographies de François ROUSSEAU, aux éditions Fitway
« Ici est tombé », aux éditions Tirésias
« Vivre par terre », aux éditions Tirésias

  • -site de H&O : les éditions H&O
  • -A noter aussi que l’association Ensemble Contre la Peine de Mort (ECPM) mène une campagne "Pas d’homo à l’échafaud" ; la question de la peine de mort en Iran, Arabie Saoudite, Afghanistan, Mauritanie, Soudan, Nigéria, Yémen, Pakistan, Emirats arabes unis a été présentée au 4° congrès mondial contre la peine de mort du 24 au 26 février 2010 à Genève.











Photos reproduites avec l’aimable autorisation de Philippe Castetbon .

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