"The kids are all right", film de Lisa Cholodenko


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Vient de sortir en dvd le film « The kids are all right », qui a obtenu 2 Golden Globes dernièrement (voir notes à la fin). En quelques mots ce film est présenté comme une agréable comédie, genre que les américains réussissent plus ou moins en fonction du nombre de « clichés » qui assaisonnent leur savante composition quasiment chimique : à savoir un peu de « scabreux », un peu de « romantisme », un peu de « convenances », un peu de « prêt à penser », un peu de « happy end »…

L’histoire est celle de deux femmes de la cinquantaine, aux prénoms très féminins (Nic et Jules) vivant en couple et ayant eu deux enfants par insémination artificielle d’un même donneur de sperme anonyme : une fille de 18 ans et un garçon de 16 ans (Joni et Laser). Or le garçon, en connivence avec sa sœur qui a atteint sa majorité, veut découvrir son géniteur. En retrouvant le dossier médical et le centre où l’insémination a eu lieu, les deux ados vont demander les coordonnées de leur père. Aux USA cela semble très simple : le jeune adulte en recherche du père fait une demande au centre concerné lequel demande au donateur s’il veut ou non communiquer ses coordonnées et sortir de l’anonymat, et le tour est joué !

M Ruffalo, jouant le rôle de Paul
Le père (Paul) n’est rien d’autre qu’un autodidacte qui cultive ses légumes bio et qui a ouvert un restaurant. Simple, attachant, pas compliqué, un peu héritier des babas cool des années 60-70, c’est un éternel célibataire qui semble bien dans sa tête, ses bottes et sa bite !

Ajouter à cela que le couple lesbien semble battre de l’aile, déjà imperceptiblement, l’une boit et l’autre ne trinque pas encore…On les voit ainsi dans leur vie de tous les jours, l’une au foyer, l’autre chirurgien affirmée et portant culotte, manageant les deux ados atteints l’un comme l’autre d’une inexpressivité pathétique pour leur âge. C’est que le film, dont le scénario est mince et les personnages peu fouillés, ennuie passablement : manque de rythme, manque de dialogues originaux, manque d’épaisseur psychologique, et surabondance de clichés pour faire « in », dont la fameuse scène du broute-minou entre les deux protagonistes en couple qui ont besoin d’un film porno gay et masculin pour arriver à se détendre et à jouir…

Le généreux donateur de sperme (Paul) va s’avérer être un type sympa avec ces deux « enfants » qui lui tombent du ciel : s’intéressant à eux, les invitant, partageant des moments de loisirs et de découvertes. De même, il sera ouvert et cool avec ce couple de lesbiennes…Lequel d’ailleurs finit par représenter une forme de « norme » ou de « référence » familiale par rapport à la vie d’hétéro-patachon de Paul jusqu’ici uniquement comblé par une métisse pulpeuse et des légumes gorgés de « bio ». Quelque part on repositionne le curseur de la « normalité », et c’est certainement le seul intérêt malicieux du film.

Julianne Moore, joue le rôle de Jules 
Mais ce personnage va vite succomber aux charmes d’une des deux femmes (Jules) qui s’occupe des plantations non comestibles de son jardin. Et de façon sincère semble-t-il, il ne voudra plus courir plusieurs levrettes à la fois !

Il n’en fallait pas moins pour créer l’intrigue et le petit imbroglio sentimentalo-guimauve de ce film, avec comme ingrédients : deux jeunes adolescents apparaissant du jour au lendemain dans la vie de cet éternel homme-ado qui a tout réussi sauf sa vie sentimentale et paternelle, un couple lesbien au bord de la crise de nerfs dont une des deux femmes va incarner momentanément le fantasme hétéro d’une mère-amante-épouse.

Annette Bening, joue le rôle de Nic
Bien sûr, l’autre partenaire du couple (Nic) découvre par hasard des cheveux de sa dulcinée dans la salle de bains de Paul (un peu dégueu tout de même vu le standing ambiant) ouvrant la voie à l’incontournable scène de ménage et à la séparation de corps…

Ce qui est amusant c’est de voir que les clichés gays et lesbiens sont aussi indigestes que les clichés hétéros. En effet, ce petit couple formé par Nic et Jules, concentré sur son bonheur bourgeois, me semble aussi terne et triste que peut l’être un couple hétéro sans aura ni dimension particulière. Quant aux enfants, axés sur leurs petites vies de consommateurs de bien-être et leurs problèmes d’identité et de sexualité naissante, ils me paraissent aussi insipides que n’importe quel gosse sans enthousiasme de famille hétérote.

Comme le couple lesbien est copié-collé sur les modèles de couples judéo-chrétiens et hétéronormés, comme dit si justement Madame H*, il n’y a pas de place pour une sexualité plus libre, plus assouvie et hors de l’obligatoire sentiment de « culpabilité » que l’on veut à tout prix lui attacher comme un boulet.
Une scène du film avec les deux adolescents

Mark Ruffalo incarne un personnage (Paul) qui attire comme je le disais la sympathie parce qu’il est simplement humain, ne se prend pas la tête et cherche à vivre au mieux ses rêves et son désir. Ce sera néanmoins, dans ce contexte « puritain » et coincé du cul, celui qui va payer et qui va devenir le bouc émissaire : rejeté à la fois par les deux enfants qui l’ont recherché sans trop comprendre les risques d’une telle recherche et rejeté en plus par Jules qui après s’être bien amusée, après avoir mentie sans vergogne auprès de son Jules bis, retourne la foufoune basse dans le mamelon familial.

L’épisode du film gay dans la chambre de Nic et Jules est un peu le symbole du film, l’homme y apparaît comme un sextoy en images ou en réel, et quand l’amusement se termine il est rangé et oublié. Le cocon se referme sur les 4 personnages de la famille Nic, Jules, Joni et Laser, qui ne sont même pas en quête d’un peu d’authenticité et de naturel. En regardant ce long métrage, on comprend le mot de Gide : « Famille je vous hais »…

Deux seules questions « dérangeantes », posées par le jeune Laser, donnent un peu d’intérêt « dramatique » au film et à son contexte : « ça t’a rapporté combien de donner ton sperme ? » demande-t-il à Paul, et en interrogeant ses deux mères : « Pourquoi regardez-vous des films de cul gay ? ». Dans l’un et l’autre cas les réponses sont bien maladroites…

Une autre scène du film, en famille
Sur le fond de la recherche de soi, de ses parents, le film ne dit rien, car ce n’est qu’un prétexte de comédie très superficielle utilisant des ressorts passe-partout. Sur le couple lesbien le film donne en revanche le sentiment d'une sacrée caricature qui à mon sens finit par nuire au propos initial. On se demande bien pourquoi deux Golden Globes ont été attribués à ce film, un pour la comédie et l’autre pour l’actrice Annette Bening (Nic), un besoin sans doute commercial de primer quelque chose estampillée « LGBT »…

Golden Globes 2011




Best Motion Picture, Comedy or Musical

The Kids Are All Right


Best Actress in a Motion Picture, Comedy

Annette Bening

Julianne Moore (nominée)


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